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L’inquiétante montée des préjudices sexuels en ligne

Alors que le harcèlement en ligne est devenu le fléau que l’on connaît, on découvre qu’Internet expose à une autre forme de violence, le préjudice sexuel en ligne. Réception d’images à caractère sexuel d’un adulte connu ou non, appels à envoyer une photo ou une vidéo sexuellement explicite partagées sans le consentement de l’adolescent, ces rencontres avant l’âge de 18 ans, redoutées de tous les parents, prennent des proportions inquiétantes.

C’est  ce que révèle  l’étude très intéressante menée par WeProtect Global Alliance (dont l’objectif est de mettre fin aux violences sexuelles en ligne contre les enfants), dont les conclusions ont été dévoilées le 12 juin dernier. On y découvre notamment qu’en France 2 jeunes âgés de 18 ans sur 3 auraient connus un préjudice sexuel en ligne.

L’étude qui portait sur l’estimation de l’exposition des enfants aux préjudices sexuels et leurs facteurs de risque en France, mais aussi en Allemagne, aux Pays-Bas et en Pologne, alerte sur l’inquiétante flambée de cette exposition chez les jeunes avant l’âge de 18 ans. À commencer par l’Allemagne (73% des répondants ont subi un préjudice sexuel en ligne avant leur 18 ans), suivi de la Pologne (69%), des Pays-Bas (68%) et enfin la France (64%).

Presque sans surprise, selon l’étude, les filles sont également largement plus touchées que les garçons par ces violences à distance (79% contre 57%), tout comme les jeunes issus d’une minorité (sexuelle ou ethnique/raciale). En moyenne, les enfants sont exposés pour la première fois à un contenu sexuellement explicite en ligne seulement deux ans après avoir commencé à avoir accès à Internet.

Autre chiffre édifiant, 85 % des personnes interrogées en France qui ont été confrontées à une tentative de discussion l’ont reçue via leur téléphone portable, et 65 % l’ont vécue via des services privés de partage ou de vidéos.

Preuve est donc faite que les enfants sont insuffisamment protégés. La réalité est que la majorité d’entre eux possèdent un téléphone dès leur entrée au collège mais n’ont pas la maturité suffisante pour réagir en cas d’intrusion d’un adulte malveillant. Au mieux ils bloqueront l’intrus sans en parler à un adulte qui pourrait signaler le prédateur afin qu’il soit poursuivi. Selon  Mié Kohiyama. (présidente du Brave Movement en France, association membre de We Protect Global Alliance “pour protéger les victimes, nous devons demander le retrait des images sans consentement des enfants et qui peuvent constituer une agression sexuelle ».

De la prévention, mais pas que…

Si le travail de prévention auprès des parents et des enfants est indispensable, une législation plus stricte encadrant la détection, le signalement et le retrait des contenus à caractère sexuel sur Internet se fait attendre.

Aujourd’hui la loi n’est guère contraignante puisqu’elle demande aux fournisseurs le retrait de contenus pédocriminels uniquement sur la base du volontariat. Une législation très peu contraignante donc qui de plus prendra fin à la fin de l’année  2024. D’où l’urgence d’agir vite pour imaginer un cadre obligeant les fournisseurs à détecter, supprimer mais aussi signaler tout contenu pédocriminel.

On peut espérer que les technologies futures aideront à repérer efficacement ces contenus dangereux, même dans le cadre de conversations privées. Et peut-être même repérer le fameux Grooming (un adulte se faisant passer pour un enfant).

En attendant, la priorité absolue reste d’obtenir une réglementation à l’échelle européenne pour tenter de freiner ce phénomène tellement destructeur pour des jeunes en pleine construction.

Photo : Annie Spratt